Les auxines, les cytokinines et les gibbérellines


Suite à la découverte des premières hormones végétales, de leurs structures chimiques et de leurs modalités de synthèse, les chimistes ont été capables de synthétiser artificiellement des molécules nouvelles qui, appliquées sur la plante, avaient les mêmes effets que l’hormone naturelle ou étaient susceptibles d’en bloquer les effets en agissant soit sur la synthèse, soit sur transport de l’hormone. On appelle ces molécules de synthèse les régulateurs de croissance. Très vite ces molécules ont été utilisées pour la maîtrise du développement des végétaux, qui recouvre la naissance et la croissance des organes, ne se faisant pas au hasard ni de façon anarchique. Il existe un système de régulation que l’on soupçonnait déjà complexe dans la seconde moitié du 20ème siècle et qui se révèle de jour en jour encore plus complexe. Ce développement reproductible est rendu possible grâce à des messagers chimiques internes à la plantes qu’on appelle hormones végétales ou phytohormones. On connaît actuellement six hormones végétales découvertes entre 1926 et 1995, avec, principalement, les auxines, les cytokinines et les gibbérellines. Mais aussi les acides abcissiques, les éthylènes et les brassinostéroïdes.

 

Les auxines (IAA) ont été les premières hormones végétales découvertes après maintes et maintes recherches s’étalant sur plus d’une cinquantaine d’années. Nous devons d’ailleurs à Frits Warmolt Went la trouvaille de cette hormone, car son travail a eu une grande influence dans la recherche sur les substances de croissance des plantes en 1926. On sait donc qu’elle est fabriquée dans l’extrémité des tiges en croissance à partir d’un acide aminé, le tryptophane. L’auxine migre ensuite depuis les tiges jusqu’aux racines. Le long des tiges, elle favorise l’allongement des cellules et différencie les tissus conducteurs, des tiges. Dans les racines, en revanche, son action ralentit l’allongement, mais favorise la formation de nouvelles racines. Par ailleurs, elle retarde la chute des fleurs, des fruits et des feuilles. Les auxines dans leur ensemble, qui agissent en très faibles quantités, sont toxiques à forte dose.

Parlons maintenant des cytokinines. En 1941, Van Overbeek et les premiers cultivateurs de tissus végétaux à la recherche de substances capables d’entretenir la croissance des explants in vitro, ont découvert l’effet stimulateur du lait de coco. Le souci d’élucider cet effet et le développement de la culture in vitro aboutissent en 1955 à l’isolement de la première cytokinine. Depuis, beaucoup d’autres ont été identifiées dans les plantes. Les cytokinines sont produites préférentiellement dans la racine d’où elles migrent vers les différents organes. Les cytokinines favorisent la division et la croissance cellulaires. Elles ne sont efficaces qu’en coopération avec les auxines. Elles stimulent l’initiation des jeunes pousses. Le développement des cultures in vitro et de leurs applications en horticulture doit beaucoup à l’utilisation des cytokinines.

 

Dans un milieu de culture in vitro, la prolifération des cellules se fait sous forme de cals si le rapport cytokinine/auxine est équilibré. Si ce rapport est élevé, les cellules se différencient pour donner des pousses feuillées et, si le rapport est faible, ce sont plutôt des racines qui apparaissent. Donc de fortes concentrations en cytokinines alliées à de faibles concentrations en auxines, nous permettent d'obtenir le développement des bourgeons et ainsi de multiplier les plantes. Alors que de fortes concentrations en auxines alliées ou non à de faibles concentrations en cytokinines, nous permettent d'obtenir l'enracinement des tiges feuillées. Et si on équilibre les concentrations de ces deux hormones, on obtient un cal. Le cal est le résultat de la prolifération anarchique de cellules plus ou moins différenciées mais qui n'arrivent plus à s'organiser en tissus et organes distincts.

L’histoire des gibbérellines est toute autre, dans les années 20, certains riz japonais contaminés par un champignon, appelé Gibberella fujikuroi, devenaient géants. Dans les années 30, les extraits du milieu de culture de ce champignon se sont révélés actifs sur la croissance végétale. Vers 1955,  ces substances ont été purifiées : les gibbérellines étaient nées. Cette famille de molécules naturelles est immense, mais seulement deux ou trois sont réellement actives dans la plante, qui sont, du point de vue chimique, plus complexes que l’auxine. Elles contrôlent l’allongement des tiges et participent à la germination des graines. Elles y déclenchent la production des enzymes nécessaires à l’hydrolyse de l’amidon en sucres simples, destinés à nourrir la plantule (la plantule est la jeune plante durant la germination jusqu’au développement des premières feuilles). L’effet reconnu en premier est donc l’effet sur la croissance des organes et en particulier sur l’allongement des entre-nœuds.